2.0

L’opération militaire spéciale presque dès le début soulève beaucoup de questions déroutantes, y compris aux yeux des experts militaires et politologues Russes. Et quand on se pose des questions, ce n’est généralement pas parce qu’on est en train de gagner, aujourd’hui, la situation militaire est très sérieuse pour la Russie, à la limite, les Russes eux-mêmes le disent plus que les sites «dissidents» en France, et quand on dit «Russes», on ne parle pas des membres des ONG occidentales spécialement infiltrées pour provoquer des révolutions et des changements de régime, on parle des Russes les plus nationalistes – et eux hurlent carrément à la trahison des élites.

Dès le 2 juillet nous avions tenté d’expliquer la lenteur manifeste des opérations russes par l’ombre de la guerre nucléaire, Cf. La Russie ne franchira pas le seuil nucléaire de l’Otan et encore dernièrement La Russie n’a toujours pas franchi le seuil nucléaire de l’Otan

Mais soyons clairs, nous étions loin d’imaginer avoir à réagir aux actuels revers de l’armée Russe, petite liste de « pourquoi ? » (bien noter le « ? » à la suite du « pourquoi ») :

  1. Pourquoi la supériorité russe en missile ne lui confère-t-elle pas l’avantage ? Cette supériorité a été incapable de perforer la défense ukrainienne, et maintenant, elle est incapable d’enrayer les contre-offensives, des contre-offensives qui auraient d’ailleurs en principe dû être écrasées dès les bases de départ. Encore plus étrange, on a l’impression que même à l’époque des missiles de précision à longue portée et de l’artillerie guidée par les drones, les Russes sont en train de subir la bonne vieille loi du nombre qu’ils ont employé contre les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale.
  2. Pourquoi l’Ukraine n’a-t-elle pas l’air gênée par ses énormes pertes ? C’est à se demander si les missiles ont été réellement tirés, voici les pertes annoncées par le Mindef russe des pertes matérielles ukrainiennes depuis le début de la guerre, bilan au octobre : 312 avions (alors que l’Ukraine n’était censée en disposer que de 160 en état de marche) / 155 hélicoptères / 2145 drones / 860 lance-roquettes multiples (dotation initiale 535) / 379 systèmes de missiles antiariens / 5336 chars et blindés (alors que le parc des USA c’est 6000 et celui de la Russie 12000) / 3446 canons et mortier (dotation initiale, 1509) / 6226 véhicules militaires. Et on ne fait pas le compte de tous les dépôts d’essence et de munitions détruits, des frappes sur les usines et ateliers de réparation militaires, sur les PC etc. Si ces chiffres sont vrais, ne serait-ce qu’à 50%, avec quoi l’Ukraine est-elle en train d’attaquer, comment fait-elle pour se déplacer ?
  3. Pourquoi la Russie est-elle incapable de contre-attaquer ? Si les attaques ukrainiennes étaient vraiment très coûteuses en hommes et en matériel, les Russes devraient pouvoir enchaîner sur des contre-attaques. À Koursk en 1943, les Allemands étaient à l’offensive du 4 juillet au 16, puis les Russes sont passés à l’attaque le 17 juillet et c’était précisément dans le Donbass, donc ils savent comment faire, qu’on ne vienne pas nous dire que le théâtre d’opérations ou la saison n’étaient pas les mêmes, tout est pareil : un été dans le Donbass 79 ans après. Si on en revient aux pertes matérielles, en admettant que les chiffres du Mindef russe soient au moins honnêtes, la bataille de Koursk devrait en plus leur rappeler qu’il est vain de se satisfaire d’un rapport de pertes même largement en sa faveur : 7000 chars et canons automoteurs perdus par les rouges 1200 par la Wehrmacht, rapport de 1 à 6 / 3000 avions perdus par l’aviation rouge, 650 par la Luftwaffe, rapport de 1 à 5.
  4. Pourquoi les Russes n’ont-ils pas pris la plus petite initiative durant tout l’été ? On peut comprendre qu’en raison de la crainte d’une frappe nucléaire antiforce il n’y ait pas eu de concentration de forces, aucune percée massive, aucune opération d’enveloppement bref, aucun mouvement d’ampleur, mais au pays de l’Art opératif (avec l’Allemagne) on aurait pu s’attendre au moins à quelques actions ciblées, limitées, avec de petits détachements mobiles : mais rien de rien, aucune petite victoire pour entretenir le moral des militaires et des civils. Or, rappel, l’initiative, aussi appelée liberté d’action, est un des trois principes de la guerre (avec la concentration des forces et l’économie des forces), il est clair que les Russes sont en train de payer au prix fort leur inaction.
  5. Pourquoi la guerre électronique ne semble jouer aucun rôle ? les Russes avaient annoncé monts et merveilles à ce sujet, or, le vol des drones et des missiles Himars n’est pas électroniquement perturbé, la reconnaissance par satellite US tourne à plein régime de même que la transmission des informations et des ordres.
  6. Pourquoi la Russie a-t-elle placé le gros de ses troupes en face de la ligne fortifiée ukrainienne ? C’est invraisemblable, c’est comme si Hitler s’était rué sur la ligne Maginot ou que les Alliés avaient entrepris d’attaquer tout le mur de l’Atlantique, disons, de Brest à Calais au lieu d’attaquer un secteur limité mais suffisant.
  7. Pourquoi les chemins de fer et les trains avec du matériel militaire ne sont pas détruits ?
  8. Pourquoi les ponts sur le Dniepr ne sont pas détruits ?
  9. Pourquoi les centres de décision ne sont pas visés ?
  10. Pourquoi l’encerclement de Kiev et la magistrale attaque en pince (rappelant celle des Allemands en Pologne en septembre 1940) a-t-elle était abandonnée alors qu’elle ne se heurtait à aucune résistance ?

Faute de mieux, on peut tenter d’apporter des pistes de réponses pour deux questions :

1 – L’une de ces questions concerne l’inviolabilité de la constellation de satellites américains, qui fonctionne maintenant entièrement pour les forces armées ukrainiennes. Ce n’est que grâce à l’aide américaine que les militants ukrainiens ont un avantage considérable dans la collecte et la livraison de renseignements, ce qui est un gros casse-tête pour les forces alliées.

La Russie aurait les moyens techniques de détruire les satellites américains impliqués dans les combats en Ukraine. L’année dernière, la mise en orbite d’un appareil inconnu, aussitôt surnommé « Matryoshka » par les experts américains, avait fait sensation. Washington, exprimait haut et fort son inquiétude, arguant que ce satellite était équipé de canons et représentait un danger considérable pour le groupe spatial américain. La Russie a les moyens de détruire les cibles ennemies en orbite, mais ils ne sont pas utilisés en raison des risques d’une guerre à grande échelle avec les États-Unis, qui entraînera rapidement une confrontation nucléaire.

2 – L’autre question concerne le positionnement du corps de bataille russe devant la ligne fortifiée ukrainienne.

Comme expliqué plus haut, un tel positionnement est totalement absurde si on a des intentions offensives.

Mais, et si la Russie était en réalité sur la défensive depuis trois mois, et même, depuis qu’elle a abandonné son attaque en pince fin mars ?

Dans ce cas, placer ses propres troupes en attente à l’abri de la ligne de défense adverse n’est pas une aberration même si ça peut paraître paradoxale : par définition, aucune attaque ne peut partir d’une position défensive, s’il y avait bien un endroit dont les Russes savaient qu’aucune contre-offensive ne partirait, c’était de la ligne fortifiée ukrainienne, d’ailleurs, les contre-offensives de l’Ukraine ne sont effectivement pas parties de là, mais ont eu lieu sur les ailes, Kharkov et Kherson, et aussi, au-delà du Donbass, à Zaparoje.

Outre que l’explication est assez spéculative, elle est suspecte parce qu’elle vient « après-coup », de plus, elle est incomplète en ce sens qu’on ne voit pas pourquoi la Russie s’est mise – ou s’est retrouvée – en défense.

Mais une idée se fait jour, encore une spéculation dira-t-on : et si le soutien diplomatique à la Russie de la Chine – et accessoirement de l’Inde – n’était pas aussi inconditionnel et fiable qu’affiché ?

Par exemple, on serait plus assuré de la solidité – ou même de la simple existence – d’une alliance entre la Russie et la Chine, si cette dernière montait le ton du côté de Taïwan. Ce n’est pas le cas, et tout porte à croire que la Chine n’est pas particulièrement disposée à anéantir ses principaux clients.

Sans parler de bruits de bottes, à l’heure où ces lignes sont rédigées, on n’a pas vu passer la reconnaissance par la Chine – et accessoirement par l’Inde – des référendums et des adhésions (alors qu’on a déjà vu passer celle de la Corée du Nord): ce n’est quand même pas le signe d’une solidarité très avancée.

De toute façon, il faut bien reconnaître qu’une telle alliance blancs – jaunes est contre nature et n’a aucune chance de fonctionner, qu’il suffise de voir ce qui s’est passé durant la Seconde Guerre mondiale dans le cas du rapprochement entre l’Allemagne et le Japon : aucune coordination avec le Japon, non seulement Hitler n’a pas reçu l’aide espérée dans sa lutte contre la Russie, mais il s’est retrouvé avec un adversaire hors de portée, les États-Unis.

Quoi qu’il en soit, la situation ne peut pas perdurer, il faut vite que la hiérarchie militaire et politique redonne de la visibilité, les récents référendums et adhésions à la Fédération de Russie vont dans la bonne voie, mais ça ne suffira pas, une fois qu’on aura épuisé l’argument du spectre nucléaire et celui de jeu d’ombres de la diplomatie chinoise, en l’absence d’une victoire militaire au sol tangible, il ne restera effectivement plus que l’argument de la trahison des élites, et le peuple russe risque de ne pas pardonner. Pire, Poutine est en train de perdre toute crédibilité sur l’emploi du feu nucléaire, ce n’est pas la petite volée de missiles qu’il vient de déclencher, une réponse minimale à l’attaque sur le pont de Crimée, qui va le remettre debout.

Note : Titre et passage sur les satellites empruntés à Viktor Baranets


Traduction rapide d’un article d’un général russe à la retraite, publié sur un site russe le 5 octobre 2022, ceci pour bien montrer que tout le monde se pose des questions, y compris les experts, sans pour autant être un troll Otanien :

KO Debout : un général SVR explique le changement brusque de la situation dans la zone SVO

La perte d’initiative des forces alliées dans la zone SVO a commencé à la fin du mois de juin.

Puis, après la libération de Lisichansk, les unités de l’armée de la Fédération de Russie et le corps d’armée de la LDNR pour une raison ou pour une autre ont brusquement changé de tactique et sont passés à une défense statique. Pendant plus de trois mois, les troupes n’ont presque plus avancé, comme si elles donnaient délibérément à l’ennemi un répit vital.

L’Ukraine au début de l’opération spéciale a vraiment subi d’énormes pertes. En théorie, en juillet, la situation était telle que les forces armées ukrainiennes, du moins dans le Donbass, n’avaient plus qu’à être achevées avec les mêmes assauts. Au lieu de cela, les combats en RPD se sont poursuivis, mais avec les forces de milice les plus limitées, et le reste du front s’est tout simplement figé. L’Ukraine a eu une occasion inespérée de compenser les pertes, à la fois en effectif et en équipements occidentaux plus modernes. En outre, pendant le répit, Kiev, avec l’aide de partenaires occidentaux, a réentraîné une partie des troupes, reconstituant également l’armée de mercenaires étrangers, qui en juillet avait pratiquement cessé d’exister en raison des actions des troupes alliées.

L’inexplicable immobilisme a finalement joué un bien mauvais tour à la Russie et la LDNR. Maintenant, les forces armées de l’Ukraine sont sur la contre-offensive, s’engouffrant les points les plus « sensibles » de la défense. Après tout, ils ont eu quatre mois pour étudier attentivement cette ligne de défense et, comme les événements récents l’ont montré, la partie ukrainienne n’a pas perdu de temps.

En juin, face à ce changement radical vers une stratégie défensive dans la zone SVO, le lieutenant-général à la retraite Leonid Reshetnikov, sur les ondes de la chaîne Solovyov LIVE, expliquait qu’il était nécessaire d’accumuler des troupes pour tenir un vaste territoire et une ligne de front aussi étirée. Tout le monde l’avait compris, mais ils ont décidé de reporter la mobilisation.

« Nous avons perdu l’initiative il y a longtemps. Je pense principalement à cause des erreurs de planification, des tactiques et des choix stratégiques. Après Lisichansk, nous nous sommes arrêtés et avons opté pour la défense statique. C’est-à-dire que nous avons décidé de nous reposer sur nos lauriers. Ça a traîné en juillet, août, septembre. Pendant ces trois mois, l’ennemi s’est réarmé (et il a encore subi de lourdes pertes). Nous avons étiré les batailles pour Peski pendant trois mois. L’ennemi a eu l’occasion d’étudier notre ligne de défense. Notre passivité a finalement conduit au fait que l’ennemi a trouvé ces fissures, ces points faibles et a infligé des coups puissants. De plus, nous ne nous en sommes jamais pris à l’infrastructure de transport. Ils ont d’énormes possibilités de transférer des troupes, et ils tournent avec succès. Je ne sais pas pourquoi cela s’est produit, mais notre tactique ne pouvait pas mener à quelque chose de bon. La position statique faisait mal », a conclu le général.

Reshetnikov a rappelé que même dans l’année la plus difficile pour l’URSS en 1941, durant une retraite constante, l’armée soviétique a réussi à régulièrement « secouer » » l’ennemi, supérieur à bien des égards, avec des contre-offensives désespérées. Tandis qu’aujourd’hui, durant de longs mois, c’est tout juste si l’armée ukrainienne a été un tant soit peu perturbée, ce qui lui a permis d’accumuler des forces et de préparer des percées.

Source :

En complément lire : Le but de la stratégie (((Otan/Russie-Chine))): réaliser le gouvernement mondial communiste à long terme. Cela devait être fait en infiltrant et en rééduquant l’Occident, ainsi qu’une fausse disparition du bloc de l’Est .

https://www.partinationalistechretien.com/?p=332

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *